L’origine Indienne des Tsiganes a été déterminée dès la fin du XVIII° siècle par la langue. Elle a été corroborée par la chronique persane d’Hamza d’Ispahan, au milieu du X° siècle, qui fut reproduite et embellie, un demi-siècle plus tard par le poète Firdousi. D’après ces textes mi-historiques, mi-légendaires, quelques milliers de Tsiganes (appelés alors Zott, Rom ou Dom) auraient été envoyés par un roi de l’Inde à son cousin le roi de Perse pour exercer auprès de lui leur talent de musiciens.
Après un assez long séjour en Perse (l’Iran actuel) les Tsiganes poursuivent leur migration, divisés en deux branches: l’une se dirigea vers le sud-ouest jusqu’en Égypte; l’autre vers le nord-ouest par l’Arménie et les contreforts du Caucase. La Grèce les accueillit à partir du début du XIV° siècle. On les trouve aussi dans une contrée comparable au delta du Nil nommée « La Petite Égypte ». C’est pourquoi, les Tsiganes furent souvent appelés en France « Égyptiens », en Espagne « Egitanos » puis « Gitanos », en Angleterre « Egypsies » puis « Gypsies ».
Les longues guerres entre les Byzantins et les Turcs rendent leur condition très inconfortable, ils cherchent alors plus à l’ouest des terres plus tranquilles. Nouvelle migration vers: la Hongrie, l’Allemagne jusqu’à la Baltique, la Suisse. L’été 1419, les tribus apparurent sur le territoire de la France actuelle à Chatillon-sur-Chalaronne, dans la Bresse, à Maçon, à Sisteron. En 1427, à la Chapelle Saint-Denis aux portes de Paris.
Entre temps, en 1422, on avait vu des Tsiganes sur les routes d’Italie avec l’espoir d’obtenir du Pape des lettres de protection, d’une portée universelle, dont ils pourraient se prévaloir dans tout le monde chrétien.
Les Tsiganes fréquentèrent les Pays-Bas, de France ils descendirent en Espagne, se posant en pèlerins de Compostelle, atteignirent l’Andalousie dès qu’elle fut libérée de la domination arabe. Les voici bientôt au Portugal. Dans les premières années du XVI° siècle, ils apparurent en Écosse et en Angleterre… Des pays Balkaniques, des tribus remontèrent en Pologne, en Lithuanie, en Russie du Sud. Toute l’Europe ayant été sillonnée par ces infatigables voyageurs, ce fut le tour du Nouveau Monde. Ils ne s’y rendirent pas toujours de bon gré. Le Portugal, pour se débarrasser d’un certain nombre de Ciganos, les expédia au Brésil. Des gypsies, passagers de bateaux anglais, découvrirent les possessions britanniques d’Amérique du Nord, la Jamaïque, les Barbades, la Virginie. Quelques bohémiens participèrent à la colonisation de la Louisiane (un siècle plus tard, leurs descendants parlaient encore le français). Seul dans le monde entier, l’Extrême-Orient ne les attire que très exceptionnellement.
Au début, les Tsiganes bénéficiaient d’un accueil sympathique et d’une large hospitalité. Mais l’insistance à se faire entretenir lassa les bonnes volontés, les villes fermèrent leurs portes et les campagnes devinrent hostiles. Les Tsiganes “font peur”, aussi les a-t-on accusés de toutes sortes de maux. Des méfaits réels, principalement d’ordre alimentaire (la maraude), mais aussi le vol de chevaux, de larcins furtifs et même de crimes imaginaires comme l’enlèvement d’enfants. Ces accusations ne sont pas inspirées par du racisme, notion relativement récente. Il s’agit de l’incompréhension mutuelle entre le monde nomade et le monde sédentaire.
Les plaintes affluèrent et les gouvernements réagirent plus ou moins sévèrement.. D’abord la Suisse en 1471, puis l’Espagne en 1499, le Saint Empire Germanique en 1500, la France en 1539. Des actes furent signés par tous les états d’Europe. Il s’agit ou bien d’expulsion pure et simple, ou bien le plus souvent, de l’alternative: ou se sédentariser ou quitter le pays dans un certain délai. Ce qui montre qu’en général ce n’était pas le Tsigane qui était visé en tant que tel, mais le nomade. La peine la plus fréquente était celle de la galère, puis venaient la mort et la flagellation surtout en Allemagne. Aux Pays-Bas, de véritables battues ont été organisées au milieu du XIX° siècle.
Dans les anciennes provinces roumaines (Moldavie et Valachie), les Tsiganes furent réduits en esclavage depuis le milieu du XV° siècle jusqu’au milieu du XIX° siècle; non par mesure pénale, mais paradoxalement parce qu’on appréciait leur habileté en de multiples formes d’artisanat. Souvent lorsqu’on a essayé de sédentariser des tribus tsiganes, celle-ci ont préféré vendre à leurs voisins tout ce qu’on leur donnait et se sauver pour vivre sous la tente ou dans de pauvres huttes de boue et de feuillage.
En ROUSSILLON, les Gitans se sédentarisaient ou nomadisaient à leur guise.
Maquignons expérimentés, en relation avec les Gitans espagnols, ils fréquentèrent assidûment les foires comme celles de Nîmes et de Baucaire, se répandaient dans tout le Midi de la France. Un grand point d’attraction en Provence: les Saintes Maries de la Mer (en Camargue). Depuis le milieu du XIX° siècle, les Tsiganes se sont mêlés aux pèlerins qui vénèrent les reliques de Sainte Marie-Jacobé et Sainte Marie-Salomé. Ils y prient surtout Sainte Sara servante présumée des deux Maries.
Depuis le milieu du XIX° siècle se faufilèrent en France les sinti-piémontais, leur professions étaient celles du spectacle. Les arts du spectacle étaient également représentés par des Tsiganes musiciens des pays danubiens et de Russie. En 1867, un orchestre tsigane hongrois, avec violons, contrebasse et cymbalum, obtint un succès immense. Aux environs de 1900, des orchestres tsiganes hongrois se produisaient dans une quantité de cafés et restaurants. Ainsi grâce à la musique et aussi à la danse, les Tsiganes ont jouit d’un incomparable prestige. Citons les deux grands représentants de la musique tsigane: le Manouche Djengo Reinardt et le Gitan Manitas de Plata.
Le génocide tsigane : l’Allemagne s’était, depuis le XVI° siècle montrée particulièrement inhospitalière. Les Tsiganes n’étaient pas considérés comme des Aryens, mais comme un mélange de races inférieures et comme des asociaux. Enfin, ce fut “la solution finale”, les Tsiganes par milliers, hommes, femmes et enfants furent internés dans des camps de concentration. Marqués sur le pyjama rayé du triangle noir des asociaux, parfois d’un Z, tatoué sur l’avant bras d’un numéro matricule, ils vivaient dans une effroyable misère, destinés au fours crématoires, à moins d’être encore assez résistants pour pouvoir travailler.
D’après un texte de Fr de Vaux de Foletier
dans « Monde Gitan » N° spécial: Les Tsiganes